
Julie s’est réorientée et étudie à présent à Lannion. Une nouvelle vie pas si facile pour la jeune femme en dépression. Entre troubles du comportement alimentaire et de la concentration, elle doit se battre pour continuer ses études.
« Être loin de chez soi, ça perturbe. » Après un an en université dans l’est de la France, Julie arrive en septembre 2022 à l’IUT de Lannion. Épuisée par l’exigence de cette première année, sa santé mentale continue à se détériorer en Bretagne.
Installée à Lannion, la jeune femme réalise rapidement que se réorienter, c’est aussi s’adapter à un nouvel environnement. Ce qui n’est pas toujours simple, surtout lorsqu’on ne va pas bien. « En 2019, j’ai vécu un événement familial traumatisant », raconte Julie. « Puis j’ai subi énormément de pression lors de ma première année d’études à la fac. C’est devenu pire à l’IUT. C’était difficile parce que je n’étais déjà pas stable mentalement. »
Petit à petit, Julie prend conscience de sa souffrance. « Je ne me nourrissais plus correctement. Je ne mangeais pas pendant plusieurs jours, ou alors, je m’empiffrais, puis je vomissais. Avant d’être en études supérieures, je minimisais ce genre de comportements. Maintenant, je réalise que ce n’est pas normal. »
Parler pour aller mieux
Le mal-être de la jeune femme est longtemps resté secret. Par peur des répercussions, elle s’interdisait d’en parler à qui que ce soit. « Je n’étais pas diagnostiquée, je redoutais d’en parler aux médecins. » En septembre dernier, après plusieurs années de silence, c’est le déclic. « Après une accumulation de situations, j’ai décidé d’aller à l’hôpital pour parler avec des professionnels. Je voulais aller mieux. » Résolue, l’étudiante pose enfin des mots sur ses tourments.
« Je prends désormais des médicaments pour atténuer mes idées noires et je vais voir une psychiatre tous les mois pour parler de mes soucis », détaille Julie. Un traitement qui facilite son quotidien, mais qui complique ses études : « J’ai du mal à me concentrer. Souvent, je dois relire plusieurs fois une phrase pour la comprendre. J’ai aussi de grosses lacunes sur les évaluations théoriques. Je ne me souviens de rien alors que je connais le cours. »
Une maladie qui ne se contrôle pas
Difficile de donner le meilleur de soi lorsqu’on a la tête ailleurs. Un constat décevant pour la jeune femme, qui se faisait une joie de poursuivre ses études. « Au début, j’idéalisais le monde universitaire. On m’avait dit que c’était trop bien et que ça me plairait… En réalité, c’est plus compliqué. Une journée de cours peut sembler parfaite, et d’un coup, sans pouvoir la contrôler, une pensée intrusive arrive. »
« Gérer sa santé mentale en plus des cours, c’est vraiment compliqué », avoue Julie. L’étudiante dénonce le manque de considération des troubles psychiques de certains enseignants. « Dans mon ancienne université, si l’on était malade physiquement, les professeurs comprenaient. Mais si l’on allait mal mentalement, on nous faisait comprendre qu’on ne justifierait pas nos absences. À Lannion, c’est différent. Même si je loupe des cours, les enseignants sont à l’écoute », optimise Julie.
Le corps universitaire prend de plus en plus conscience du mal-être étudiant. À Lannion, des actions de prévention sont organisées par la ville. Néanmoins, certains étudiants gardent le silence. À l’image de Julie, quatre étudiants sur dix présentent des symptômes dépressifs depuis l’épidémie de covid-19 en France.
* À la demande de l’étudiante, son prénom a été modifié.