Au fil des maux

Gilles Lepicard et ses élèves prennent une pose de Qi Gong
Gilles Lepicard apprend à ses élèves à maîtriser leur énergie. ©Louis Blanchard

En plein essor, les thérapies complémentaires font aussi leur trou dans le milieu de la santé, jusque dans les centres hospitaliers. 

Le bras de Clara est un dragon. Son majeur est devenu une tête, et guide l’énergie de la jeune femme. Elle tente de garder la pose, mais peine à ne pas rire. Ce soir, elle s’est incrustée avec curiosité au cours de Qi Gong dans la lumineuse salle de travail du Crous de Lannion. Clara et sept autres étudiants sont rassemblés en cercle. Ils apprennent des mouvements en tentant d’ « aligner leur corps et leur esprit ». Ils sont réunis autour de Gilles Lepicard, leur professeur. Il tente de leur expliquer les postures “C’est comme dans Kung Fu Panda

Le Qi Gong est une branche de la médecine chinoise. Comme toutes les médecines non reconnues par l’Ordre des médecins, elle fait partie des médecines parallèles. Ces traitements se distinguant de la médecine occidentale sont en plein essor depuis la crise du Covid. Selon un sondage Odoxa, la moitié des Français seraient plus enclins à y recourir qu’en 2018.

Concilier corps et mental

Selon Gilles, l’activité permet de réduire la sédentarisation: « Quand le corps ne bouge pas, notre énergie stagne et crée de l’énergie perverse. En pratiquant le Qi Gong, le corps s’entretient naturellement. » Pour ce faire, les participants vont donc travailler à partir d’étirements sur la conscientisation du stress, du sommeil. Le point fort du Qi Gong : travailler la coordination entre le corps et le cerveau sans s’en rendre compte. D’un air amusé, Gilles résume son art : « On apprend à ne rien faire, mais à bien le faire.» 

L’hypnose aussi s’est développée ces dernières années. « On vient en complément des médecines classiques » expose Nelly Trauchessec, hypnothérapeute à Lannion: « On fait entrer le patient dans un état modifié de conscience. Cela permet de traiter de sujets difficiles comme le deuil, le stress, l’anxiété ou les troubles alimentaires. »

« Collaborer avec les autorités sanitaires »

Le Qi Gong et l’hypnothérapie sont pris au sérieux dans le milieu médical. Gilles Lepicard, en plus des ateliers au CROUS, a animé de nombreuses formations pour des infirmières dans des hôpitaux. « Il n’y a pas d’antagonisme entre la médecine conventionnelle occidentale et le Qi Gong, voire la médecine traditionnelle chinoise en général. » Gériatrie, anesthésiologie, traitement des cancers, les médecines chinoises sont de plus en plus utilisées en complément des traitements hospitaliers selon une étude de l’Académie nationale de médecine datant de 2013. C’est en réalité le cas de plusieurs médecines alternatives, l’hypnothérapie notamment. Dans son cabinet réunissant plusieurs spécialistes en médecines douces, Nelly Trauchessec a ainsi souvent l’occasion de mener des travaux de groupe avec d’autres professionnels de santé (sage-femmes, infirmières, médecins généraux).

Les collaborations se font beaucoup pour des clients réticents à la médecine classique. « À la première séance, je pose plusieurs questions pour connaître les motivations des patients. L’idée est de travailler avec les autorités sanitaires. Si j’ai besoin de faire remonter des inquiétudes au sujet d’un malade, je le fais. Mais je préviens le patient, c’est important qu’il soit au courant. » 

Qi Gong ou psychothérapie, nos deux spécialistes s’accordent sur un point : « On est là en complément de la médecine classique. Ce qui est sûr, c’est que l’on ne va pas guérir un cancer. »