Au fil des maux

Au volant de sa fourgonnette frigorifique, Xavier livre chaque matin des repas à domicile. ©Guillaume Petit-Marzin
Chaque matin, ils sont deux à livrer une centaine de repas à Lannion et ses alentours. Un service qui permet aux personnes âgées de rester à domicile et de voir du monde. 

Une dernière cigarette roulée, un café et Xavier part pour sa tournée. Il n’est pas facteur, mais porteur de repas à domicile pour le centre communal d’action social (CCAS) de Lannion. “Aujourd’hui, on distribue 49 plateaux repas. On peut monter jusqu’à 65 par tournée”. Ils sont deux chauffeurs à distribuer une centaine de repas à Lannion, Ploubezre et Ploulec’h. Chaque plateau est unique. “Il y a des personnes qui mangent sans sel, d’autres sans sucre. Certaines n’ont plus de dents, donc on leur prépare des repas moulinés. Ils nous disent aussi ce qu’ils aiment ou non, pour qu’on adapte au mieux les plateaux”, détaille Xavier.

 

“On est souvent leur seule visite de la journée”

 

Les porteurs de repas ne font pas qu’apporter à manger aux personnes âgées. Ils ont un rôle social très important. “On est souvent leur seule visite de la journée. On a un rôle de veille, on vérifie que tout va bien. On regarde s’ils mangent bien les plats qu’on apporte”, confirme le porteur dans la voiture. Xavier se gare et monte chez Madame Morin qui a soufflé ses 100 bougies en début d’année. “Bonjour Madame !”, s’exclame-t-il en pénétrant dans l’appartement. Pas de réponse. “Elle doit être absente. Ah non, elle dort dans son fauteuil.” Une fois le repas rangé dans le frigo, Xavier s’assure que tout va bien. Il claque la porte et explique : “J’ai vérifié qu’elle respirait encore”. Les porteurs sont parfois les premières personnes à arriver après un décès. C’est l’un des aspects difficiles du métier.

La livraison de paniers permet aux clients de garder un lien social ©Guillaume Petit-Marzin

Vers 9 h 30, retour à l’EHPAD Saint-Anne pour recharger les repas pour la seconde partie de la tournée. Un deuxième café et s’est reparti. Xavier connaît le trajet par cœur. Il optimise les trajets, les demi-tours pour gagner quelques précieuses minutes. Les repas doivent être livrés ni trop tôt, ni trop tard, entre 8h et 12h. Si son temps est compté, de temps en temps, Xavier reste un peu plus longtemps à l’intérieur. “Je vois bien quand ils ont un coup de mou, donc on reste un peu pour discuter et pour prendre un café”. 

 

“Il y a des liens qui se créent”

 

Monsieur et madame Plunet est l’un des rares couples qui se fait livrer ses repas. Pas très intéressés par le menu du jour, ils préfèrent s’attarder les vacances de Xavier au Québec. “Tu as pris des couleurs ! Et alors, tu étais content de revoir ton fils ?”. Cette question, Xavier y a répondu plusieurs dizaines de fois depuis le début de la tournée. “Forcément, quand tu vois les gens tous les jours, il y a des liens qui se créent. On rentre dans leur intimité. On connaît leurs petites habitudes”, explique-t-il en accélérant sur la petite route.

 

Beaucoup de personnes âgées se font livrer les repas, car ils ne peuvent plus se déplacer pour faire les courses. C’est le cas de Madame le Merrer qui se les fait livrer depuis deux mois. “Mes enfants ne pouvaient plus faire toutes mes courses. Et moi, je ne peux plus y aller”, détaille-t-elle en souriant.

 

Le menu pourrait paraître presque secondaire. Pourtant, tous partagent l’avis de Madame Garnier, qui jette un dernier coup d’œil gourmand aux plats préparés. “Je cuisinais beaucoup avant, donc je suis difficile. Mais je dois reconnaitre que les repas sont très bons” avoue la retraitée avec un sourire malicieux.